mardi 14 août 2007

The law won



Le CNE a fêté ses deux ans ces derniers jours. Ni fête, ni bougies, pas même un petit cadeau pour le célébrer.

Il a été bien malmené ce contrat censé redonner à la France l'allant pour un marché de l'emploi prospère, attaqué de toutes parts, sur sa droite comme sur sa gauche, politiquement et juridiquement.


L'affrontement est comme souvent politique, la gauche s'opposant au projet tandis que la droite en est initiatrice, cependant que le centre... euh... le centre... non, euh... rien.

Plus particulièrement, le MEDEF s'est avéré ne pas être un grand soutien du projet alors que la CGPME, dont les membres sont les principaux destinataires de la mesure CNE, a défendu becs et ongles le maintien du contrat. A droite, la mesure ayant été préconisée par un gouvernement Villepin, Nicolas S. et ses sbires n'ont pas jugé utiles d'afficher un enthousiasme débordant... quand ils n'exprimaient pas un désaccord presque net (voir CPE).


Comme si tout ça ne suffisait pas, c'est la justice qui se mit à donner la fessée.

Ainsi, alors qu'il n'avait pas encore un an, il s'est vu requalifié en contrat à durée indéterminée par un conseil des prud'hommes. Selon cette juridiction, la possibilité de licencier un employé sans motif pendant une durée de deux ans était déraisonnable au regard de la convention 158 de l'Organisation Internationale du Travail ratifiée par la France en mars 1990.

Et paf.
L'employeur décide de faire appel de la décision.
Entre temps, c'est un imbroglio juridique qui va avoir lieu, propre à la France, de part sa dualité de juridiction (judiciaire et administrative), le gouvernement arguant, via le préfet, que les juridictions de l'ordre judiciaire étaient incompétentes pour juger de la conformité d'une ordonnance à une convention internationale. L'ordonnance n'avait pas été ratifiée par la loi et conservait donc une valeur réglementaire dont seule la juridition administrative est compétente pour juger de la conformité aux normes supérieures. Le tribunal des conflits considèrera toutefois que l'ordonnance avait été "implicitement" ratifiée par deux lois de décembre 2005 et mars 2006. L'ordonnance étant considérée comme ayant "force de loi", la Cour d'appel saisie par l'employeur pouvait donc à son tour juger au fond de l'affaire, le juge administratif s'avérant incompétent.
Badaboum.
La Cour d'appel de Paris a donné raison aux juges de première instance le 6 juillet 2007, là encore en se fondant sur la supériorité de la convention 158 de l'OIT sur un texte national de valeur législative.

Tout ceci pourrait paraître n'être que masturbation pour sombres juristes en mal d'émotions fortes. Et pourtant, c'est bien le politique qui devrait être titillé. Car ces nombreuses péripéties sont la preuve que le droit n'est pas neutre, la plupart du temps, il est même éminemment politique. Le fait que ce soit la norme d'une institution internationale qui ait été l'outil pour faire échec à l'ordonnance portant création du CPE devrait être un motif d'espoir. C'est bien la preuve que des remparts existent à la tendance actuelle de certains fatalistes considérant que face à la concurrence internationale sur le marché du travail, la réponse ne peut être que l'alignement social par le bas.

Voilà l'un des terrains d'action à privilégier pour les décennies à venir.
Les plus brillants éditorialistes nous resservent à intervalles réguliers le plat d'une gauche ringarde incapable de réforme. Il est temps pour nous, socialistes, de prouver l'exact contraire en internationalisant peu à peu le champ géographique de la réforme.
Il ne s'agit pas de remporter cette bataille pour les droits sociaux internationaux dès demain. On a pu constater déjà la difficulté toujours plus grande de s'accorder entre voisins européens.
La patience devra être notre plus grande alliée dans un dessein que plusieurs générations seront chargées d'alimenter et de porter.

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