lundi 24 mars 2008

Deux voies de mémoire



Dans pas longtemps, amis libertaires et progressistes, on va morfler.
Souvenez-vous... le 29 avril 2007. Il y a un an, il y a un siècle, il y a une éternité.
Un candidat ruisselant de sueur appelait à la liquidation d'un esprit.

Ca ne se passait pas en Russie, ni en Corée du Nord, ce n'était pas à Cuba ni au Venezuela. C'était ici même pendant un temps démocratique unique en son genre : la campagne présidentielle.
Le candidat de la droite refaisait l'histoire en relisant la prose d'Henri Guaino : les gamins qui n'avaient pas encore les cheveux longs et qui occupaient la Sorbonne étaient désignés comme les responsables de tous les maux de la France de 2007 : crise de l'école républicaine, capitalisme financier devenu incontrôlable, règne du cynisme, de la flambe et du fric.

On nous avait habitué au discours classique sur les pertes de valeurs morales qui auraient abaissé le rang d'une France toujours moins folle de la messe. Mais voilà qu'on reproche désormais aux enfants de mai de favoriser ce qu'ils n'ont eu de cesse de critiquer.
Quel que soit ce qu'on affirme, il semble que ce n'est plus la cohérence du propos qui importe mais le volume sur lequel il est prononcé. Ce soir-là, le chef de la droite a hurlé des contresens aussi fort que ses proches conseillers ont haï le courant d'air du mouvement de mai. Ils ont détesté la critique de l'ordre établi, la quête des idéaux, les impertinences surréalistes, les revendications sociales et d'une manière générale l'immense bordel hétéroclite d'aspirations d'alors. Comme souvent, la droite a réagi en châtiant et en vomissant ce qu'elle ne comprenait pas.

Elle l'a si peu compris que presque 40 ans plus tard, l'accusé est tout trouvé pour les échecs à venir déjà prévisibles en avril 2007.
Crise de l'école : mai 68.
Capitalisme fou : mai 68.
Parachutes dorés : mai 68.
Waterloo, Dien Bien Phu, Alésia, Schumacher qui dégomme Battiston, Kennedy abattu à Dallas, la disparition des dinosaures, tout ça, ce sera peut-être bientôt la faute à Cohn-Bendit.
D'affirmations péremptoires et infondées en indignations privilégiant raccourcis percutants plutôt qu'analyses complètes, on falsifie l'Histoire et les idées en les simplifiant jusqu'au non-sens. Au fil des jours, il est de plus en plus question de changer la France dans son avenir en maquillant son passé.

2 commentaires:

Jéjé a dit…

Je voudrais juste souligner cette tendance qui est devenue une façon de gouverner : le rabâchage. il est vrai qu'à force de répéter toujours les mêmes arguments haut et fort sans soucier de leurs cohérences, leurs efforts finissent par porter avec comme but ultime en faire une vérité générale aux yeux de tous. Je pense par exemple à l' "impatience" des français qui n'est en fait qu'un ras le bol et un dégoût de la politique exercée. Je pense aussi aux 15 milliards censés relancer la consommation mais qui n'ont servi qu'à conserver un certain électorat. Je pense enfin qu'à force de dire que la gauche n' a jamais rien fait, les gens vont finir par se demander pourquoi elle existe. Tout cela nous laisse présager encore 4 longues années bien tristes et inquiétantes.

Anonyme a dit…

C'est vrai que pour tous ceux qui ont connu 68, c'était un grand vent de liberté qui soufflait, il nous semblait que tout était possible...Nous étions jeunes et naïfs...et 40 ans après de qui nous héritons? D'un Louis de Funès, mégalo, sectaire et parano...
Mais n'oublions pas que la gauche n'a pas su, depuis 40 ans, concrétiser ce vent de liberté et d'espoir de Mai 68.